L'espace d'un instant, tout me semblait familier.
Des paysages inconnus reflétaient pourtant la même nostalgie que je ressentais parfois lorsque j'étais assis sur mon lit, dans ma chambre dont je connaissais les recoins par cœur, et que je pensais intuitivement à mon moi passé. Une attente interminable à penser que mes prochains jours ne ressembleront pas à.. avant.
Je me souviens d'un temps mort, or tant que je n'avancerai pas, tout restera figé. Une boucle continuelle dans un même espace-temps, une heure à revivre sans cesse.
Par amour, j'aurais tout donné, y compris ma personne et ce qu'elle contient, à l'exception du mauvais. J'aurais pu propager mon amour comme le blé fait vivre sa couleur, comme l'astre avive son énergie et comme la lumière taraude les gens maussades pour les embellir.
Dans ma chambre, tout me rappelle ce que je ne suis plus, des décorations en guise de souvenirs flottants, des spectres ne sachant où aller, des fioritures sur mes murs me laissant penser que je fus condamné à mort il y a quelques années. La vie s'échappe de mes orbites pour se faufiler dans l'amoncellement de la ville. Dans les moindres recoins, ma vie en devient une autre, elle laisse une longue traînée derrière elle, les piétons n'y prêtent pas attention. Elle dépose son empreinte sur le béton fêlé.
L'ombre d'un vivant pour costume habituel, je ne sollicite plus que la présence de ma solitude.
Dans l'écuelle de mes fantasmes, on y trouve abondance de songes insensés, des rêves froissés que je n'accomplirai jamais. Des frivolités qui rongent mon cœur angoissé et compressé. Et pendant ce même temps, le parquet dévore mes jambes sans que j'y prête la moindre attention.
J'attends tout de l'amour mais j'ignore tout des sentiments humains. Je baigne dans la lumière du jour et pense revivre mais l'obscurité de mon corps me fait croire que la nuit tombe déjà. J'attends tout de l'amour, oui, ou plutôt d'un amour capable de me faire traverser les âges, ou même de me remettre sous le nez des saveurs que j'ai connues pour me les retirer aussitôt. J'attends qu'il recommence cela plusieurs fois, jusqu'à ce que je sois pris d'un profond dégoût et que le désir d'aimer ne me revienne plus à l'esprit. J'attends là, ivre de respirer interminablement le même air contaminé, las de ravaler les gouttelettes qui tombent sur mon visage et qui, à force, finirait même par disparaître, emporté par l'eau de mon corps. Nouvelles pluies provenant d'un ciel qui lui baigne dans le gris, ce n'est que quand le soleil s'éteint et se cache de mes yeux que je peux voir le paradis, mon paradis, des néons, des orbes cristallisés, des fragments de la folie des hommes sous un regard alangui, qui à leur tour laisseront à nouveau place à la douce aurore d'un jour fraîchement né.
Je ne me détache plus de ma couche et sous mes draps j'entends les échos lointains de mon âme égarée qui revit la tempête de mon vécu.
Sous ces draps, j'ai toisé, apprécié de fines esquisses qui maintenant ne sont que poussières face au vent, j'ai touché l'épiderme d'une chimère et contemplé mièvrement une rêverie qui à ce jour s'échappe de mon esprit. J'oublie, sans le vouloir, je perds mes fondements, ce que j'ai pu vivre.
C'est ici que tout a commencé, l'origine de mon monde se situait dans son tendre regard, et, en un instant, ses yeux m'avaient rendu ma quiétude, avaient sculpté ma silhouette et affiné la personne qui se présente aujourd'hui devant vous. Je suis là car elle en avait décidé ainsi.
Faisons semblant de tout reconstruire, essayons d'y croire dans une étreinte qui perdurera à travers le temps, loin de toute agitation, entre deux arbres morts.